La vie affective avec le syndrome de Prader-Willi (SPW)
" La vie intime sera toujours compliquée "
Sheila Warembourg
L’intérêt pour les relations sociales et affectives chez les personnes ayant un syndrome de Prader-Willi est clair et lié à leur fort besoin d’être aimé et reconnu.
Avoir un amoureux, avoir quelqu’un à côté de soi que l’on retrouve, cela donne une place vis-à-vis du groupe. Etre aimé c’est avant tout être aimé comme on est, d’où l’importance donnée à cette vie affective et à ces relations.
Accepter le handicap est une chose, mais aider son proche à s’accepter comme il est en est une autre. Les adultes expriment très clairement leur volonté d’être aimés comme ils sont. Pour des familles confrontées en permanence à la différence, aux difficultés, ce n’est pas forcément une démarche évidente. L’aide d’un psychologue ou psychiatre sensibilisé à la pathologie peut être précieuse dans cette démarche
Nos enfants ressentent comme tout un chacun une vie affective et un attrait sexuel qu’ils expriment dès leur plus jeune âge.
Mais comme pour tout le reste, l’expression est différente, caricaturale et mal équilibrée : trop ou trop peu.
L’hypersensibilité dans les relations sociales prend plusieurs formes : le fait d’offrir un cadeau peut signifier pour eux que l’autre nous appartient un peu, ils pourront avoir une très forte expression de l’émotion avec beaucoup de théâtralisation, ou à l’inverse «encaisser le coup» mais les émotions pourront revenir à court / moyen terme.
Cette hypersensibilité peut se manifester par un aspect dévorant de leurs relations affectives qui peut faire fuir l’autre. Ceci s’explique par le fait qu’ils sont extrêmement contents d’avoir quelqu’un qui les écoute ou les aime. Cela se manifeste dans la relation aux professionnels, à la famille, dans les liens d’amitié et dans la vie affective. Il faut :
Chez les personnes ayant un syndrome de Prader-Willi il y a des comportement de séduction francs, une certaine desinhibition pouvant conduire à des comportements déplacés en public.
Cela commence souvent à l’adolescence et est très lié au regard des autres, à la volonté d’avoir une vie normale.
Les codes sociaux doivent être appris et réappris en permanence puisqu’il n’y a pas de compréhension intuitive de la norme sociale, ni de capitalisation des expériences.
Les codes sociaux doivent leur être clairement explicités, un apprentissage implicite n’est pas opérant ici, d’où la nécessité d’une démarche spécifique.
Ne pas nier que cela existe : « Pour pouvoir être « responsables » de leur vie intime ou sexuelle les personnes ayant une déficience intellectuelle doivent avoir accès à l’information », comme l’exprime Sheila Warembourg, diplômée en sexologie.
Pour cela, les familles peuvent anticiper le fait d’avoir besoin d’un accompagnement ou d’un relai pour en parler : être à l’aise avec le sujet ne s’improvise pas. Une éducation sexuelle peut être mise en place si besoin est. Ceci doit être fait par une personne référente et formée. L’éducation sexuelle les aidera à connaître leur corps et ses particularités (troubles de l’érection, sexe de petite taille, ...).
La participation à des discussions en groupe sur les sujets tels que la sexualité, l’amitié, le sentiment amoureux peut être soutenante. Les questions, les verbalisations des autres, peuvent les aider à avancer quant à leur propre questionnement.
Il est possible de se tourner vers le planning familial, il y a des gens compétents pour parler de sexualité. Il existe aussi des formations pour les professionnels, des stages de parents représentants d’association. Le bilan de fin de séjour au SSR d’Hendaye est aussi un espace de verbalisation utilisé par de nombreux parents qui profitent du bilan de sortie pour aborder les questions autour de la sexualité de leur jeune.
Il existe des expériences de vie de couple plus ou moins autonome (avec un encadrement sanitaire et éducatif) qui peuvent fonctionner. Ce sont des cas particuliers, fortement dépendants de l’état des personnes, il est donc difficile de généraliser sur un tel sujet.
Lors des discussions avec les personnes et pour répondre aux questions qu’elles poseront, mieux vaut rester au plus près de ce qu’elles peuvent entendre.
Maman d’une jeune femme de 29 ans |
Les histoires d’amour entre personnes ayant un syndrome de Prader-Willi se nouent souvent dans des séjours adaptés ou à Hendaye puisque c’est un des rares endroits où ils se retrouvent entre eux. Les relations sont assez immatures mais de vrais sentiments peuvent exister. Ma fille et son amoureux s’apellent toutes les semaines, partent en vacances adaptées ensemble. Avec cette relation, j’ai pu voir ma fille se décentrer, être plus attentive aux besoins des autres. Si un jour ma fille m’exprime le besoin de vivre avec son amoureux qui habite actuellement à 600km de chez nous, nous considérerons les conditions dans lesquelles cette vie de couple pourrait s’organiser.
Les personnes ayant un syndrome de Prader-Willi peuvent être sujettes à une vulnérabilité importante dans leurs relations sociales et leur vie affective car elles n’ont pas la même perception des choses que nous et elles peuvent être prêtes à faire beaucoup de choses pour être aimées. Leur vulnérabilité vient aussi de leur rapport à la nourriture sur lequel peuvent jouer des personnes malintentionnées.
Cependant il arrive que des personnes atteintes du syndrome de Prader-Willi se plaignent d’attouchements, de gestes déplacés, souvent après coup. Il est alors compliqué de dénouer le vrai du faux, de faire la part des choses entre leur perception et la réalité. Cependant, même s’il s’agit plutôt d’une réalité « déformée », celle-ci est toujours significative de quelque chose : un mal-être, une difficulté relationnelle avec quelqu’un.
Insister sur la compréhension des termes est indispensable car ils peuvent ne pas recouvrir la même réalité que celle communément admise : faire l’amour ça veut dire quoi ? avoir un amoureux ça implique quoi ? Chercher à savoir si les deux personnes sont au même niveau pour faire un choix, vérifier qu’il n’y a pas de domination. Leur apprendre à dire NON et à respecter le corps (le leur et celui de l’autre).
Il y a aussi une difficulté de distance entre un sujet abordé et le passage à l’acte rapide. Ceci est vrai pour la sexualité comme pour d’autres thèmes. Par exemple, une jeune femme atteinte du syndrome de Prader-Willi pourrait se dire que si on lui prescrit la pilule, il faut qu’elle ait des rapports sexuels. De même au SSR d’Hendaye, les professionnels ont voulu introduire une procédure de « mariages » pour éviter que les personnes ne multiplient les relations lors de leur séjour à Hendaye. Cette procédure a été prise au pied de la lettre et tout le monde a donc voulu se marier.
Les ateliers autour de l’estime de soi, de l’apparence peuvent aider à travailler la dignité et l’estime de soi.
On peut leur apprendre à investir leur corps, par exemple en sachant leur dire dès l’enfance « tu es beau/belle ».
Pour aborder la question du corps, des livres d’enfants sont bien faits, en particulier sur les changements corporels lors de la puberté.
Par ailleurs, pour les jeunes travaillant avec les animaux, les soins d’hygiène à l’animal peuvent aider pour comprendre le corps, le respecter.
L’accès aux soins est un droit, et toute personne en situation de handicap doit revendiquer ce droit d’être suivie et accompagnée dans tous les domaines de la santé.
Les soignants du centre de référence ou des centres de compétence abordent en consultation les question autour de la vie affective et sexuelle. Il est important que les femmes aient également un médecin gynécologue dédié, et que les hommes puissent aussi exprimer leurs désirs, leurs craintes... auprès de leur médecin traitant. Un traitement hormonal et contraceptif est souvent donné aux jeunes adultes, nécessitant un suivi spécialisé.
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